Ça faisait plusieurs années qu’une amie libraire BD m’avait conseillé de lire Shangri-La. Quand j’ai vu que Mathieu Bablet était mis à l’honneur aux Utopiales et que la médiathèque en bas de chez moi avait cette BD, je me suis dit que c’était l’occasion. Et je ne regrette pas de l’avoir fait, puisque c’est un livre magnifique.
Il dépeint un futur dans lequel l’humanité a quitté la terre et vit dans une station spatiale complètement contrôlée par l’entreprise qui à la fois gouverne et vend tous ce que les gens achètent. L’injonction à consommer est partout, comme si c’était la clé du bonheur. Pourtant, on voit dès le début que les conditions de vie ne sont pas formidables : toustes les habitant⋅e⋅s ont le même appartement minuscule et une partie de la population, des animaux anthropomorphes, est victime d’une forme de racisme. La population est traversée par de fortes tensions et la révolte grandit face aux décisions de l’entreprise qui gouverne.
Se révolter, pourquoi et comment ?
Contrairement à d’autres livres, ici la révolte n’apparaît pas comme une évidence. Certain⋅e⋅s sont contre, d’autres sont pour, mais pas forcément pour les mêmes raisons. Et surtout, la question qui divise est comment agir. Faut-il employer la violence ? La révolte doit-elle être populaire ou menée par une élite ? Que construire à la place de la société dans laquelle on a toujours vécu ? Même si les problématiques abordées sont assez classiques (la société de consommation, la dictature, l’exploration spatiale), le fait de questionner la forme que doit prendre la révolte donne de la profondeur à l’œuvre.
Dessin et couleur
Visuellement, c’est très beau. Ce sont de grandes pages et on en prend vraiment plein les yeux. Les décors sont dessinés avec beaucoup de précision, et si j’ai bien compris Mathieu Bablet a travaillé à partir d’images de la NASA pour ses paysages spatiaux. Le traitement de la couleur est assez intéressant, on a souvent une couleur dominante sur une ou plusieurs pages, avec une grande attention portée aux nuances et à la lumière. La dimension visuelle rend l’histoire encore plus puissante.
Bref, cette BD m’a beaucoup marquée et je vous conseille vraiment de la lire.
Attention quand même, il y a pas mal de violence et les blessures ne sont pas toujours très belles à voir. CW par rapport à ce qui est raconté et montré : violence, blessures, mort, viol, racisme, nudité sexualisée.
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